|
| Les réserves d'hydrocarbures cachées dans le sous-sol du Grand-Nord et découvertes "grâce aux" changements climatiques et au réchauffement de cette région, n'ont apporté qu'un bref et ultime délai au modèle énergétique mondial. Face aux menaces imminentes de pénurie, les dirigeants du monde ont lancé, à la fin du XXIème siècle, un vaste projet de nucléarisation énergétique de nos modes de vie, avec la construction d'innombrables centrales nucléaires et l'invention de techniques permettant de contrôler, de transformer et de distribuer cette énergie à tous les niveaux de la société.
Le début du XXIIème siècle fut une période d'opulence et de formidable développement, de révolution même pour des populations entières jusqu'alors totalement démunies et abandonnées dans le jeu de la mondialisation. Cependant, derrière cette prospérité globale se cachait le spectre d'une prolifération nucléaire ingérable à longs termes. Des zones immenses et désertes servaient de décharges où l'on y entassait les déchets nucléaires de toutes sortes. Mais l'on ne contient pas des déchets nucléaires comme l'on stocke des déchets ménagers. Les fuites et les infiltrations se multipliaient, tandis que dans certaines grandes mégalopoles ou encore dans des campagnes plus pauvres et éloignées, la corruption et la bureaucratie entrainèrent des catastrophes sanitaires et écologiques sans précédents. Des pollutions dans tous le réseau hydrographique de certaines régions du globe, de la rivière à la source souterraine, en passant par les sols, amorcèrent un processus, à l'échelle planétaire, que rien n'aurait pu entraver. Durant les années 2125-2135, d'étranges observations étaient rapportées un peu partout sur Terre. Dans un premier temps, ce fut des arbres et d'autres végétaux que des gens racontaient avoir vu pour la première fois de leur vie et dont il n'existait aucun écrit sur eux. Certains arbres pouvaient mesurer plus de 300 mètres de hauteur et leur circonférence atteignait parfois celle d'une maison. En parallèle, de nombreux pêcheurs rapportaient des poissons inconnus et énormes. Une organisation scientifique internationale fut créée et envoyée aux quatre coins du globe pour enquêter. Les résultats furent surprenants. Alors même que la biosphère était à son plus mal - le nombre d'espèces animales et végétales avaient diminué de plus de 70% depuis le début du XXIème siècle -, ils identifièrent des quantités innombrables de nouvelles espèces avec des populations grandissantes et proliférantes. "Proliférantes" était un mot faible dît un jour un naturaliste indépendant lors d'une réunion du Conseil du CSNLE (Center of Studies for New Lives Encountered) - la fameuse organisation scientifique internationale. "Invasives dont rien n'empêchera leur reconquête de tous les environnements de la planète et à nos détriments" continua le naturaliste devant le Conseil muet face au ton grave et inquiet de celui-ci. "C'est une vengeance qu'opère en ce moment même la Nature contre nous, ni plus ni moins. "
Le naturaliste expliqua qu'il avait trouvé en analysant certains de ces NSS (New Strange Species) morts, des sortes d'hormones de croissance inconnus et en très forte concentration, leur faisant atteindre des tailles gigantesques. De plus, ils semblaient se reproduire beaucoup plus vite et plus souvent, et paraissaient s'adapter à n'importe quel environnement, mus par un formidable instinct de conquête. "Ce sont des mutations engendrées par nos activités nucléaires qui ont entraîné l'apparition de ces méga-faune et méga-flore" conclut-il.
Très vite, partout sur la Terre, des forêts d'arbres démesurés à l'écorce impénétrable avançaient sur les villes. C'est comme si la Nature s'était dopée pour gagner une course à l'extermination qu'avaient lancé l'humanité contre elle-même. Tel un judoka, elle s'était servi de la "force" de son adversaire - l'énergie nucléaire - contre lui. Lançant son armée reconquérir ses territoires, elle ne laissait aucune chance à son ennemi, pris de vitesse. L'humanité dû se réorganiser. Réduite en l'espace de quelques décennies à quelques millions d'individus - contre 12 milliards en 2125 -, privée de ses villes, de ses moyens de transport, et vivant dans un monde où la nature était plus forte, plus grande, l'humanité se sentait bien petite dans ce monde peuplé de géants, et bien humble, sentiment qu'elle n'aurait jamais dû oublier... |
|
|