Scénarios arborescents
Arborescence du scénario 8429

De l'Abstrait à la Réalité

Emma claque la porte de son appartement.
Son sac sur le dos, elle descend les escaliers rapidement et légèrement, ses pieds se soulèvent à peine des marches.
Elle pousse la porte de secours, détache la lourde chaîne, la prend dans ses longs doigts fins et la range dans le top case de sa moto.
Elle ajuste la jugulaire de son casque, glisse ses mains dans le fourreau de ses gants.
De dos, elle ressemble à un insecte. Sa combinaison noire, cintrée à la taille et moulant ses hanches, elle enjambe l'ennemi et s'y agrippe, jusqu'à ce qu'elle mette le moteur en marche et dans le vrombissement, son corps se serre à la moto, elle vient de dompter la bête et elle fait corps avec elle.
A chaque virage, elle se penche et ondule comme si son engin était à peine posé sur le sol, elle a l'impression de voler.
Elle ralentit a l'approche du passage piéton et laisse traverser la petite fille qui la regarde avec insistance et curiosité comme dans une rencontre avec soi-même.
Puis elle repart, laissant flotter sa queue de cheval au vent. Emma gare rapidement sa moto et sort ses affaires.
Le minimum pour son voyage était contenu dans une mallette, son parfum, son maquillage et son ordinateur Mic. Le reste de ces affaires avaient été expédiées la veille, dans une grande malle.
Dans son petit sac à dos, se trouve le plus précieux à son voyage et à sa vie. Le témoin, celui qui ne la quitte jamais. C'est son âme et ses yeux, son appareil photo.
Souvent, elle pensait au jour où, elle aussi se ferait greffer dans la pupille la puce Horus, pour prendre une photo simplement en regardant un sujet. Il suffisait de faire une mise au point au moyen de la pensée et déclencher la prise de vue par un battement de paupière bien défini. Les infos stockés dans la mémoire visuelle sont restituées par captation des ondes. Mais actuellement la technique présentait trop d'imperfection comme l'effacement des données, le piratage de photos et de vidéos dans le cerveau, utilisé à des fins misanthropiques.
En soulevant son casque, elle tire sur le ruban qui maintient ses cheveux attachés. Elle passe une main dans ses boucles rousses. Elle secoue la tête. Des mèches folles explosent, sa crinière semble s'enflammer autour de son visage clair.
Au loin, on entends quelques sifflements et commentaires graveleux sortit d'un trou, duquel émergent des hommes recouverts de terre et de poussière. Ils abandonnent là, leur chantier de construction, pour regarder passer Emma qui ne se laisse distraire de son avancer vers l'aéroport.
Son retard lui fait accélérer le pas. La chaleur de son corps augmente. Alors, elle dégrafe les boutons de son blouson et les cris se font plus fort.
En arrivant à leurs hauteurs, elle lance de ses grands yeux verts, un regard froid en direction des hommes. En un instant, le silence règne. C'est comme si Emma réussit à faire taire une meute de chiens bruyants. Les ouvriers se remirent au travail avec le regard penaud d'un enfant que l'on viendrait de gronder, pris les mains dans le pot de pâte de chocolat, mais heureux du goût qu'il a encore dans la bouche.
Quand elle eut le dos tourné, elle esquissa un sourire. Elle acceptait d'être complimentée mais avec respect. Néanmoins, elle s'étonnait toujours de plaire physiquement à quelqu'un, puisqu'elle pensait que dans la vie, l'âme est une partie intégrante du corps et qu'il est nécessaire de s'intéresser au deux.
Elle se mit à courir car elle sait bien que dans certaine circonstance elle ne peut arriver en retard. L'avion pour Kwili ne l'attendrait pas.
Ce manque d'organisation lui a souvent permis de faire des rencontres extraordinaire.
Tout en cherchant son billet d'embarquement, elle repense à la mission que lui a confié Bill.
Ils s'étaient rencontrés quand Emma était en quête de sa mission sur Terre. Elle n'était affiliée à aucun groupe mais elle s'intéressait aux actions menées par certains évolutionnaires. Comme à son habitude, elle avait acceptée une invitation à la dernière minute. Elle participait à une réunion des opposants de l'abétisation des masses.
Dans cette salle de réunion éclairée par le halo de petites lumières magnétiques, Emma vint s'asseoir à côté de Bill. Enfoncé dans son fauteuil, c'était un homme petit et plutôt replet, aux yeux agrandis par les verres de ses lunettes, ce qui lui donnait un air de gentil nounours. Il se présenta simplement à Emma, lui qui se trouvait au sommet d'une des plus grandes agences de Libre ExPression. Il était souvent en proie au menace des extrémistes de tout bord, pour ses articles sur la vérité de la pensée, de la parole et de l'action.
Bill compris rapidement qu'Emma serait un atout de qualité dans son agence et il lui proposa de travailler avec lui. Elle accepta sachant que sa liberté serait préservée.
Elle voyait en lui le père qu'elle n'a jamais eu. Et Bill admirait en elle cette farouche indépendance.
Une tendresse réciproque s'était installée dans leur relation amicale et professionnelle. Ce sont des rapports humains qu'Emma appréciait, pour la sincérité de leurs échanges.

C'était arrivée deux jours plus tôt, alors que Call le frère de Bill, écrivait par télépathie avec un correspondant sur place, un article sur le trafic des enfants de Kwili-Bong, il fut retrouvé dans le bureau de son appartement, à terre, le corps convulsionné et sur le visage une expression étrange, d'effroi, de douleur et de joie. Tout laissait à penser que le gouvernement de Kwili avaient envoyé ses agents secrets pour abattre un lucide, gênant.
Sous le choc, Bill voulait personnellement comprendre, et tirer cette affaire au clair. Il publierait l'article de son frère, fût-il un hommage posthume.
Mais pour cela, il avait besoin d'Emma, de ses qualités de photographe.
Il fallait encore des preuves par l'image pour que les gouvernements en apparence incorrompus, pousser par l'opinion public et les sondages, agissent. Biensûr tout une presse a été crée à partir de ce constat. Et les agences de photo du gouvernement étaient les spécialistes du photo-montages et de la fausse information.

Le message de l'hôtesse donnant l'éternel consigne de sécurité tira Emma de ses pensées.
L'avion roule sur le tarmac. Emma sourit au sensation d'accélération qu'elle ressentait.
Le Flycar dans les airs faisait un bruit assourdissant, dans son jardin de banlieue Gus leva la tête en regardant cet avion qu'il ne prendrait jamais.

A SUIVRE…

Créé par dolphindigo* le 27/03/2009 | Evaluer ce scenario
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De l'Abstrait à la réalité 2

Il baisse à nouveau la tête et souffle machinalement sur ses fleurs en plastique noircies par les hydrocarbures de l'aéroport.
Il n'a jamais envisagé de partir vers une quelconque destination qui le sortirait de ce trou.
Gus est un homme voûté, non que la vie ait été dur, mais ses habitudes ont eu raison de lui.
Dans les murs de clôture en aluminium, il voit le reflet de son visage au teint blafard comme un papier peint jauni par la fumée et ses cheveux fins luisants. Il a les yeux creux d'un homme sans rêve.
Il a eu de la chance pour certain, un malheur pour d'autre, de travailler toujours dans la même entreprise.
Son père l'avait fait entré dans cette usine.
Depuis quarante cinq ans, tous les matins à 4h, alors que le soleil est encore couché, lui, se lève et se glisse machinalement dans sa combinaison grise.
Là, debout face à l'évier de tôle ondulée, il trempe les gâteaux de rations (provenant des destockages militaires) dans son ersatz de café, qui a d'avantage un goût de réglisse et l'amertume des jours sans joie.
À quatre heure trente précise, il franchit le seuil de l'exiguïté de sa maison de fonction de 14,8m2 réglementaire pour un homme seul, sans progéniture.
Il se rend 100 mètres plus loin, dans l'Usine "wash end".
Gus coupe des morceaux de serpillière.
De temps en temps, il s'arrête et regarde ces kilomètres de serpillière.
Que pourrait-il faire avec? les mettre d'un bout à l'autre pour faire le tour de la terre, aller jusqu'à la lune sur un tapis volant?
Rencontrer un jour la personne qui tiendrait cette serpillière?
NON! Il pouvait étrangler son dernier patron avec, ou lui enfoncer dans la bouche jusqu'à ce qu'il s'étouffe?
Son regard ne laisse rien paraître de ces pensées machiavéliques.
Parce que, quand Gus s'arrête de travailler, c'est simplement pour regarder ces kilomètres de serpillière, il ne pense à rien. Et, il reprend son travail.
Aucune drogue n'est additionnée à la nourriture fournie par "wash end", aucun lavage de cerveau n'est effectué sur Gus.
Et aucune ambition ne vient troubler son rythme. Il exécute la même fonction, pour le même salaire.
Durant les restructurations, différents gérants se sont succédés. Ils ont montré les déficits de l'entreprise, empêchant ainsi, toute augmentation. La loi de la 4 ème ère Glacière en faveur du patronat exigée par Koze 1er, renforça le gel des salaires. Sauf pour quelques résistants qui réussirent à manifester, et à faire valoir leurs droits.
les manifestations consistèrent à envoyer un flot ininterrompu de messages signés sur les serveurs du gouvernement. Tout message signé était de fait inattaquable. Ce sont là, les méandres incompréhensibles au commun des mortels des livres de la justice.

Après une journée de 10h00 de travail, Gus rentre chez lui.
Il saisit une des boîtes métalliques pareilles à toutes les boîtes de vie-end (viande), suspendues au plafond, par l'inversion de l'attraction terrestre dans cette zone.
Il s'assied sur son lit-sofa pour manger ce repas froid.
Ensuite, il regarde son mur.
Les multiples taches colorées des fibres optiques scintillent et s'assemblent pour former une image.
L'écran de la tv s'illumine automatiquement sur la chaîne de "wash end". Pour accéder aux autres émissions, Gus doit allonger le bras mais, il regarde le programme automatique. Il finit par s'endormir jusqu'au lendemain.
À 4h00 Gus se lèvent et prends son café face à l'évier, la tv commente en litanie les événements du monde :
"A kwili-bong tout va bien. les hommes du gouvernement ont rétablie l'ordre et arrêter les suspects dans l'affaire des rumeurs sur le trafic d'enfants."
A l'écran, on voit la carcasse d'un Flycar entourée de lianes et de branches multiples, dans la jungle. On entend le bruit des animaux. Passant dans le champs de vision des caméras, deux hommes cagoulés et armés des fusils "derniers cris" poussent une dizaine de personnes.
(La tv clignote c'est l'heure pour Gus d'aller à l'usine. Il franchit le seuil…)
L'une d'entre elles, une femme aux cheveux en bataille fait un clin d'oeil complice à un homme chauve. Ils se font aussitôt bousculés par le grand musclé cagoulé.
La tv s'éteint.
Emma trébuche. Elle voit la scène se dérouler au ralenti. Le profil de cet homme lui fait penser à dauphin. Elle tient la manche de sa chemise bleue, bascule et elle l'entraîne dans son plongeon.
Il tombe sur le dos et amortit la chute d'Emma. Leur corps serré l'un contre l'autre, elle sent, le souffle chaud dans son cou et la respiration bruyante contre sa poitrine. Emma tend sa main en l'air, elle a tout juste le temps de protéger sa nuque. Une chose énorme, verte et collante, leur tombe dessus.

Créé par dolphindigo* le 02/04/2009 | Evaluer ce scenario
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