Le Pacte Génétique

Le professeur Chaloe prend conscience de l'urgence face aux conséquences incalculables et quasi-irréversibles d'un réchauffement climatique permanent.

Malgré des mois de discussions avec les directeurs du CNRS, ces derniers refusent son projet. Le coût de l'opération est trop important. De plus, si succès il y a, il faudrait produire plusieurs fusées de ce type, ce qui représente une rentabilité trop faible par rapport au but recherché.

L'abandon de l'idée du filtre à CO2 arrive comme un coup de marteau mental venant achever son rêve, son espoir de sauver l'humanité d'une quasi-extinction. Il est persuadé que le coût de cette opération serait bien plus bas que celui que va devoir verser les gouvernements mondiaux pour réparer les soubresauts climatiques. La lassitude, conséquence d'un sentiment fataliste, s'empare de notre professeur. Il ressent un grand besoin de sommeil. Demain sera un autre jour. Une idée peut si vite arriver.

De retour chez lui, il suit son train-train quotidien. Il vaque à ses loisirs habituels : discussion avec sa femme, repas, lecture du journal entrecoupé par la télévision, entretien de son bonsaï et lecture au lit avant de rejoindre le monde des rêves.

Durant plusieurs nuits, il rêve d'hélices et de lignes de couleurs qui tournent en tout sens.

Une nuit, il oublie d'abreuver sa plante du nectar de transparence bleue. Il se réveille en pleine nuit pour effectuer son rituel. S'il n'a pas pu sauver l'humanité, il fera tout son possible pour sauver ce végétal.

La terre brunie drapée de vert se gorgeant de cette eau, il caresse doucement ses feuilles. Dire que ce sont les Egyptiens qui ont commencé, il y a 4 millénaires de cela, la culture de cet arbre que l'on croirait tout droit venu de Lilliput. Il continue ses caresses, se surprend même à lui parler et finit par rejoindre Morphée au pays des songes.

Les jours ne cessent de s'écouler. Pourtant un jour, un assistant du professeur Chaloe, Frantz Quenark, déboule dans le laboratoire avec une plante. Il explique qu'il s'agit d'un ficus benjamina qu'il cultive dans son appartement qui neutralise le formaldéhyde qui n'est autre qu'une substance cancérigène qui émane de nombreux supports domestiques tels les colles de tapis, des mousses d'isolation, cosmétiques, etc.

- J'ai également un ficus elastica et un lierre que j'utilise pour éliminer le Benzène que l'on trouve dans de nombreux solvants et peintures…
- Oui, oui, oui, venez-en au fait. Pourquoi vous nous avez amené cette plante ?
- Euh… eh bien, vous savez que la surface de nos forêts mondiales diminuent au fur et à mesure des activités humaines. L'abattage massif des arbres de l'Amazonie en est un exemple saisissant…
- Allez au but, Frantz !

Le haussement de ton de son patron le déstabilise durant une seconde avant qu'il ne parvienne à reprendre le fil de sa pensée.

- Eh bien, j'ai pensé qu'au lieu d'utiliser un filtre artificiel de gaz carbonique, nous pourrions utiliser un autre filtre naturel, comme le sont mes plantes d'appartement.
- Et vous pensez à quoi ?
- Je me suis souvenu des travaux actuels du Dr. Hideki Koyanaka qui pensent fixer plus efficacement le dioxyde de carbone que ne pourrait faire les plantes en développant un matériau qui reproduirait à bas coût la photosynthèse.*
- Ah, je vois que les japonais cherchent les mêmes solutions que les nôtres, s'exclame le professeur, résigné.
- Justement, je crois que notre meilleure arme contre l'accumulation du CO? dans l'atmosphère est la photosynthèse.
- C'est à dire ?
- Eh bien, il faudrait tout simplement créer une plante qui fixe encore plus efficacement les CO? que celles qui existent actuellement.

Le professeur Chaloe trouve l'idée intéressante. Mais il pense qu'il y a une grande incertitude dans la réussite de ce projet. Il réfléchit à cette possibilité durant une journée entière avant de donner son feu vert le lendemain matin. Avec l'aide d'un de ses amis généticiens, ils élaborèrent plusieurs types de plantes OGM par croisements et manipulations.

Jusqu'au jour où ils créèrent l'incroyable plante. Les tests réalisés ont montré que la photosynthèse de cette nouvelle plante absorbe jusqu'à 500 fois plus de dioxyde de carbone qu'une plante naturelle.

Les deux chefs d'équipe montrent leur œuvre auprès des directeurs du CNRS qui finirent rapidement par voir le grand intérêt de planter ce végétal à l'échelle nationale, d'abord, puis mondiale.

En collaboration avec l'ensemble du personnel de la fonction publique d'Etat, des collectivités territoriales et du service hospitalier, chaque bâtiment, chaque étage sera doté d'une plante anti-CO?.

Rapidement, l'on commence à fabriquer des forêts anti-CO? un peu partout sur le territoire. La France, nouveau moteur dans la lutte des gaz à effet de serre, devient un modèle. En plus des plantes écologiques, les scientifiques français inventent un corail grand consommateur de CO?.

Imperceptiblement, au fil des années, le réchauffement climatique se ralentit avant de se stabiliser.

Mais les scientifiques français se lancent encore dans un autre projet fou : récupérer l'eau de pluie pour les enfouir dans des cuves géantes et ainsi diminuer un autre gaz à effet de serre plus réchauffant encore : l'H2O.

La température mondiale se refroidit légèrement, puis accélère dans son refroidissement.

Dans leur élan, les scientifiques ont omis une chose qui allait devenir l'élément principal d'un autre problème planétaire: La raréfaction de l'eau.

Sans qu'ils ne s'en aperçoivent, une entreprise qui allait devenir une multinationale se prépare à revendre le nouvel or bleu aux pays qui se montreront les plus offrants…

*véridique